La télévision japonaise a fait ses choux gras de ces images. Festivaliers serrés, boissons alcoolisées, masques mal portés… Depuis lundi, les organisateurs de la dernière édition du festival hip-hop Namimonogatari ne passent pas un très bon moment. Il faut dire que l’événement et ses excès ont eu lieu seulement deux jours après l’entrée en état d’urgence sanitaire de la préfecture d’Aichi, le 27 août, conséquente à la cinquième vague de Covid-19 qui touche l’archipel. Résultat, le site du festival se résumait encore vendredi à un long message d’excuses, et les autorités locales ont promis de priver ses organisateurs de l’accès aux infrastructures publiques.
Le Namimonogatari2021, qui s’est tenu dimanche en plein air à l’Aichi Sky Expo de Tokoname, résume à lui seul les dilemmes qui agitent les professionnels de la musique, au Japon comme ailleurs. Après des mois de reports et d’annulations, le retour aux affaires tant espéré s’accompagne d’une longue liste de règles aussi justifiées que délicates à faire respecter. Sans un public raisonnable et une bonne situation sanitaire, le spectacle vivant peut vite être privé de son adjectif. Malheureusement, la mi-2021 passée, le Japon continue de se débattre avec le Covid-19 et son variant delta : 21 préfectures sur 47 sont sous état d’urgence, et pourraient en sortir plus tard que prévu. Dans un tel contexte, tout événement rassemblant du public est scruté à la loupe, et les effusions les plus banales deviennent matière à critiques.
Pour leur défense, les organisateurs du Namimonogatari2021 disent avoir dûment rappelé aux festivaliers les différents gestes barrière au cours de la journée, menaçant même d’arrêter la musique en cas de respect trop aléatoire du port du masque. Ils ont aussi été pris de court par les nouvelles restrictions décidées au cours du mois d’août par la préfecture d’Aichi : vente d’alcool déconseillée, jauge limitée à 5000 personnes… Problème, les boissons étaient déjà achetées et les billets déjà vendus, et annuler en catastrophe n’était pas envisageable.
Une semaine plus tôt, un autre festival avait pris le risque d’organiser une “édition unique dans des circonstances particulières”. Annulé en 2020, le Fuji Rock Festival s’est finalement tenu du 20 au 22 août à la station de ski de Yuzawa, dans la préfecture de Niigata, non soumise à l’état d’urgence. Exceptionnellement, l’affiche était 100% japonaise et les concerts retransmis sur YouTube. Au chapitre des restrictions, le bar ne vendait pas de boissons alcoolisées et le nombre de billets mis en vente était réduit, accueillir 130 000 personnes comme en 2019 étant bien sûr impensable. S’il n’a pas fait scandale comme le Namimonogatari2021, internautes et médias japonais n’ont pas manqué de chercher les comportements excessifs à pointer du doigt. D’aucuns jugent que les critiques qui se sont abattues sur le festival hip-hop trahissent - pour certaines - un mépris particulier pour cette culture.
Si le risque N°1 reste celui d’un éparpillement dans l’archipel de festivaliers potentiellement malades, les artistes eux-mêmes ne sont pas hors d’atteinte du virus. L’affiche du Fuji Rock Festival a ainsi dû être quelque peu modifiée pour cause de cas de Covid-19. Les présents, eux, ont cru nécessaire de justifier leur participation… quand d’autres, après coup ont exprimé des regrets. Lundi, le DJ Zeebra a ainsi tweeté qu’il n’aurait pas dû participer au Namimonogatari2021, où la situation était selon lui “dangereuse”. “Je me sens responsable en tant que leader de la scène hip-hop”, a-t-il écrit sur le réseau social. Le groupé féminin FAKY, présent dimanche à Tokoname, a lui soigneusement effacé toute trace de l’événement sur ses réseaux sociaux.
Chez les idols, là non plus, le tableau n’est pas des plus reluisants. Près d’une quinzaine de membres du groupe SKE48 ont attrapé le coronavirus, dont une apprentie âgée de 12 ans, clouée au lit plusieurs jours par une fièvre carabinée. Chez les AKB48, plus d’une vingtaine de cas ont été recensés, et le célèbre théâtre d’Akihabara va devoir rouvrir au ralenti. Pour le très contagieux variant delta, ces groupes au nombre de membres invraisemblable sont du pain béni. Et le contact avec les fans, cheville ouvrière de la culture idol, fait trop bon ménage avec le virus. Heureusement, il y a encore le streaming, mais ne va-t-on pas s’en lasser, à force ? Aujourd’hui encore, des festivals sont annulés, des tournées sont reportées, et quand ils ont lieu, les concerts sont vus d’un mauvais oeil. Ne me parlez même pas de quand nous reverrons nos artistes préférés dans l’Hexagone. Je ne pensais pas encore me préoccuper du Covid-19 en septembre 2021, et pourtant… Je crois qu’il va à nouveau falloir faire preuve d’un peu de patience.
■ LA SEMAINE
Naoko Yamada, réalisatrice de Sound ! Euphonium, Silent Voice et Liz et l’Oiseau bleu, a quitté le studio Kyoto Animation. La nouvelle a été plus sous-entendue qu’annoncée via le teasing du nouvel animé qu’elle dirige chez Science SARU, The Heike Story. Adaptation d’un classique de la littérature japonaise médiévale, Le Dit des Heiké, la série sera diffusée par Wakanim dès le 15 septembre. Le scénario est signé Reiko Yoshida, avec qui Naoko Yamada a plusieurs fois travaillé, et le character design original est l’oeuvre de la mangaka Fumiko Takano. Je vous laisse apprécier la bande-annonce, qui augure du meilleur.
Lisa de BLACKPINK va interpréter son single solo au Tonight Show de Jimmy Fallon le 10 septembre. Melon publie une liste des 100 meilleures chansons K-pop où Gee des SNSD n’est que 5e ? Le mangaka d’horreur Kazuo Umezu (L’Ecole emportée) va sortir une nouvelle oeuvre en janvier prochain. La série live Cowboy Bebop produite par Netflix sera accompagnée d’un comics et d’un roman. La collaboration entre Marvel et Naver Webtoon continue avec la sortie d’un webtoon Shang-Chi. Hello Kitty sera disponible en DLC dans Super Monkey Ball Banana Mania, et je n’ai envie de rien d’autre. Des jeux Game Boy et Game Boy Color bientôt ajoutés au Nintendo Switch Online. Préparez-vous aux tremblements de terre japonais à l’aide de la réalité virtuelle. Partez camper dans une tente BABYMETAL grâce à cette collaboration avec l’équipementier Coleman.
■ LE MORCEAU
Oui, une gravure idol qui chante, et alors ? Quand elle a la voix d’Ai Shinozaki, il n’y a pas à discuter. Pour ceux qui font semblant de ne pas savoir, une gravure idol est un modèle qui pose plus ou moins déshabillé pour des magazines et des DVD. Leur visage souriant figure souvent sur les couvertures d’hebdomadaires de prépublication de mangas. A 29 ans, celle qui nous intéresse ici a aussi fait ses preuves dans la musique, d’abord dans un groupe d’idols à thématique écologique (pourquoi pas) puis en solo à partir de 2015. Grâce à de bonnes chansons et à une très jolie voix, la jeune femme a prouvé qu’elle n’était pas faite que pour sourire devant l’objectif. Malheureusement, depuis 2018 et la sortie de l’album You & Love, c’était le silence radio. Jusqu’au 27 août, jour où la première vidéo de sa nouvelle chaîne YouTube a été mise en ligne. Celle qui est incluse ici, une reprise de la chanson Squall de Masaharu Fukuyama, a été publiée le lendemain. La mélodie est peut-être un peu sirupeuse, mais quand j’entends Ai chanter, je sais pourquoi elle m’a manqué.
■ LA SÉRIE
Alors que s’annoncent les vacances d’été, des collégiens et leur établissement dérivent vers une autre dimension. Quand commence le premier épisode de Sonny Boy, le spectateur les trouve déjà occupés à appréhender l’univers mi-étrange mi-familier qui les entoure. Jeté ainsi en plein milieu de l’action, j’avoue m’être demandé si j’avais bien lancé le premier épisode… En cours de diffusion au Japon et proposé en France par Wakanim, le nouvel animé du studio Madhouse intrigue. Si le début laisse craindre une issue façon Sa Majesté des mouches, la conflictualité se dilue rapidement pour laisser place à un mélange poético-bizarre de tranche de vie, de turpitudes adolescentes et de science-fiction. Côté staff, Shingo Natsume (One Punch Man, Boogiepop and Others) est à la réalisation et au scénario, et l’auteur du manga Stop !! Hibari-kun !, Hisashi Eguchi, signe le character design original. Il n’y a pas d’opening, mais l’ending est cool. Huit épisodes sur 12 (à priori) ont pour l’heure été diffusés.
■ LE LIVRE
Quand il s’agit de s’intéresser au monde qui nous entoure, nous avons tous nos sujets de prédilection. Chez moi, l’espace et les sectes sont en bonne place. Les deux sujets me fascinent, mais me font aussi un peu peur. Ça tombe bien, l’éditeur Mangetsu vient de sortir l’une des dernières oeuvres en date de Junji Ito, Sensor, où ces deux thèmes tiennent une bonne place. L’humain peut-il se permettre de faire face à l’immensité de l’univers, ou son arrogance risque-t-elle de le plonger dans le chaos mental ? Au fil des pages de ce nouveau manga, premier inédit de l’auteur publié par la jeune maison, celui-ci laisse libre court à l’imagination débordante qu’on lui connaît, et tisse un récit empreint de mysticisme où les visions terrassantes ne manquent pas. Je regrette juste la mise au second plan du personnage féminin, un développement que l’auteur reconnaît lui-même dans son commentaire. A ce propos, la préface est signée Hideo Kojima, et la postface Virginie Nebbia, alias Morolian, déjà autrice de la postface de la réédition de Tomie chez le même éditeur.
■ LE DESSIN
■ L’AGENDA
🎥 La nouvelle édition de L’Etrange Festival aura lieu du 8 au 19 septembre au Forum des Images, et il y aura du cinéma japonais. En compétition, d’abord, avec Prisoners of the Ghostland de Sion Sono (un film américain, certes). Dans les focus, ensuite, avec plusieurs films d’Atsushi Yamatoya et Yuzo Kawashima. D’autres longs-métrages nippons - et Sud-Coréens - se cachent dans la programmation. Les réservations en ligne sont ouvertes.
2 rue du cinéma, 75001 Paris
🎨 Le Centre culturel coréen à Paris propose une exposition gratuite qui devrait ravir les amoureux des livres. Intitulée Minhwa “Chaekgeori... de la beauté des livres”, elle rassemble les oeuvres d’artistes contemporains inspirés des natures mortes de style chaekgeori, centrées sur les livres et l’écriture. A voir jusqu’au 10 septembre.
20 rue la Boétie, 75008 Paris
📷 L’exposition Moriyama - Tomatsu : Tokyo continue à la Maison européenne de la photographie jusqu’au 24 octobre. S’y trouvent plus de 400 photos de Daido Moriyama et Shomei Tomatsu, chacun occupant son propre étage. L’amour du noir et blanc est recommandé.
5/7 rue de Fourcy, 750004 Paris
🎥 Le cinéma MK2 Bibliothèque programme 12 films d’animation japonaise à raison d’un par dimanche à partir du 5 septembre. Les trois derniers films ne sont pas encore connus, mais sont déjà annoncés Les Enfants de la mer, Promare, Akira ou encore Liz et l’Oiseau bleu. Une avant-première de 7 Jours de Yuuta Murano aura même lieu le 3 octobre. Dernière projection le 12 décembre.
128/162 avenue de France, 75013 Paris
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C’était Cyberia N°#008. A samedi !
@presenceinwired